La défunte, mère de deux enfants mineurs, avait de son
vivant institué un mandataire posthume (en l'occurence son père) à l'effet de « faire tous les actes
d'administration et de gestion de toute sa succession pour le compte et dans
l'intérêt de ses héritiers ».
Le père de ces derniers, administrateur légal sous
contrôle judiciaire, a été autorisé à accepter purement et simplement la
succession en leur nom et a demandé au juge des tutelles l'autorisation de
vendre l'appartement dépendant de la succession, vente à laquelle le mandataire
posthume s'est opposé.
Les juges du TGI de Créteil (4 nov. 2008) ont accueilli
la demande du mandataire posthume en retenant notamment que son pouvoir de
gestion impliquait la possibilité de s'opposer à la vente.
La Cour de cassation censure solennellement la
décision en rappelant, au visa des articles 812, 812-1, 812-4 et 389-3, alinéa
3, du Code civil, que les pouvoirs d'administration ou de gestion qui peuvent
être conférés au mandataire posthume en vertu des articles 812, alinéa 1er, et
812-1 du Code civil ne lui permettent pas de s'opposer à l'aliénation par les
héritiers des biens mentionnés dans le mandat, laquelle constitue l'une des causes
d'extinction de celui-ci prévues par l'article 812-4 du même code.
Cass. 1re civ., 12 mai 2010, n° 09-10.556
Note :
La décision de la Cour de cassation ne peut
être qu’approuvée : le jugement méconnait directement les dispositions de
l’article 812-4 du Code civil :
"Le
mandat prend fin par l’un des événements suivants :
1°
L’arrivée du terme prévu ;
2°
La renonciation du mandataire ;
3°
La révocation judiciaire, à la demande d’un héritier intéressé ou de son
représentant, en cas d’absence ou de disparition de l’intérêt sérieux et
légitime ou de mauvaise exécution par le mandataire de sa mission ;
4°
La conclusion d’un mandat conventionnel entre les héritiers et le mandataire
titulaire dumandat à effet posthume ;
5°
L’aliénation par les héritiers des biens mentionnés dans le mandat ;
6°
Le décès ou la mise sous mesure de protection du mandataire personne physique,
ou la dissolution du mandataire personne morale ;
7°
Le décès de l’héritier intéressé ou, en cas de mesure de protection, la
décision du juge des tutelles de mettre fin au mandat."
Parce que le mandat posthume ne constitue pas
une fiducie, les héritiers peuvent disposer du bien, objet du mandat. Et ils
sont les seuls à pouvoir le faire, seuls ou dûment assistés.
Un tel acte de disposition met naturellement
fin au mandat, par disparition de son objet. Le mandataire ne peut donc pas s’y
opposer.
Pour éviter un tel risque, susceptible de
jeter à bas l’organisation patrimoniale mise en place par le défunt, le mandat
posthume aurait pu être complété par la stipulation dans un testament d’une
clause d’inaliénabilité d’une durée équivalente au mandat, mais ce n’était pas
le cas en l’espèce.
On rappellera enfin que l’avocat est habilité
à devenir mandataire posthume.
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